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Les cafés de Goasmeur et Toulibil

Les deux cafés de Goasmeur

Au cour du vingtième siècle, Goasmeur était déjà un carrefour très passager, en particulier au retour des marchés de Saint-Renan et de Brest. On avait coutume de dire que les attelages rentrant de Saint-Renan s’arrêtaient automatiquement tant le cheval y avait ses habitudes.

Le premier bistrot, le plus proche de l’embranchement de la route de Saint-Renan, était surtout fréquenté par une clientèle rurale. Les boissons servies, conformément à la licence IV qu’il possédait, étaient essentiellement le vin rouge "La Grappe Fleurie" de chez Le Page, la bière, en canettes uniquement, du champagne breton (mélange de Rhum et de limonade), des apéritifs, Saint-Raphaël et Ricard, et du café à la cafetière. Un rayon d’épicerie et d’alimentation complétait l’activité de l’établissement. Le journal, Le Télégramme, y était également en vente.

Ce café assurait aussi une restauration rapide le dimanche soir. En fin de sortie, la jeunesse pouvait se rassasier de cassoulets, de sandwiches, etc...

Arrêt facultatif des cars Castel-Couture entre Brest-Le Conquet, il délivrait les billets aux voyageurs.

Une autre ligne avait également son arrêt au bistrot : le car Lansonneur du Conquet. Il desservait, le vendredi, le marché de Brest où les fermières allaient vendre leur beurre et leurs oeufs et également, le samedi, celui de Saint-Renan._ Pour celui-ci, en plus du beurre, des oeufs et des lapins, les paysans embarquaient parfois des cages de porcelets.

Ce bistrot a été tenu par Philomène et Louis Raguénès, par ailleurs employé communal, de 1940 à 1967. A cette date, Ginette, leur fille, a pris la succession jusqu’à la fermeture en 1972. Elle garde un merveilleux souvenir des années passées dans cet établissement tant le contact avec cette clientèle rurale était chaleureux.

Le second bistrot de Goasmeur, à une centaine de mètres du précédent, en s’éloignant du carrefour vers Toulibil, lui aussi muni de la licence de quatrième catégorie, pouvait donc servir tous les alcools. Il comportait également une alimentation et une épicerie. En 1951/52, au moment de l’installation du réseau électrique à Plougonvelin, un restaurant a complété l’ensemble. Les équipes "E.D.F." et les artisans électriciens du pays en étaient la clientèle attitrée.

Le dimanche après-midi, les jeunes s’y distrayaient en jouant aux cartes. Mais dès que les bandes brestoises de Saint-Pierre Quilbignon arrivaient, en vélo à l’époque, souvent des bagarres se déclenchaient.

Monsieur et Madame Joseph Leven ont géré l’établissement de 1940 à 1958. M. Leven travaillait à l’arsenal de Brest et Madame tenait le café avec ses filles.

A Toulibil porte du Trez-Hir !

L'arrivée du tram

Dès le début du 20ème siècle le carrefour de Toulibil est la porte du Trez-Hir. En effet, c’est le 12 juillet 1903 que débute le service régulier de la ligne de tramway Brest-Le Conquet. L’établissement important du lieu est la gare de l’arrêt "Le Trez-Hir" ; il devient un pôle actif de la commune.

Venu de Ploumoguer, en 1904 ou 1905, François Bleunven, forgeron de son état, s’installe à ce carrefour où la famille occupe dans un premier temps la maison voisine de la gare du côté Ouest. Dès 1909 un changement de bord s’opère, le foyer Bleunven emménage dans la grande maison qu’il vient de construire du côté Est de la station.

Dynamique et entreprenante, Françoise y élève ses quatre enfants, Eugénie, Yves, Germaine et Francis, tout en développant son "débit de boisson" de quatrième catégorie qu’elle animait déjà dans sa précédente résidence.

Pendant quelques années une petite activité agricole est menée de front avec le couple "forge-bistrot". Deux vaches apportent leur contribution aux revenus du ménage qui peut ainsi vivre en quasi autarcie, cas fréquent dans nos campagnes à cette époque.

Cependant la composante agricole est très vite abandonnée au profit d’une activité commerciale élargie. En effet, Françoise a, dès le début, associé au bistrot un rayon épicerie-alimentation. En toute saison, les promeneurs venus de Brest le dimanche, les touristes à la belle saison, et bien sûr les Plougonvelinois tout au long de l’année, font "marcher le commerce". Aux beaux jours, une distraction favorite, pour grands et petits du voisinage, est l’arrivée du tram qui, quand une grande affluence l’impose, traîne une remorque, la "Buffalo", dont la traction pose bien des problèmes dans les côtes. Dames de la ville joliment "chapeautées", enfants "enrubannés" ou "costumés en marin", sont, à leur corps défendant, les acteurs du spectacle.

En 1932 le "Chemin de Fer Electrique" cesse son activité. L’automobile, qui pointe le bout du capot, et le transport collectif par car, prennent le relais. Le café Bleunven devient gare à son tour, gare pour l’arrêt des cars qui, entre Brest et le Conquet via Plougonvelin, ont pris le relais du tramway. Cette époque voit aussi le début de la mise en place des stations à essence. La pompe à bras, munie dans sa partie supérieure de deux réservoirs de cinq litres en verre qui se remplissent alternativement, commence à faire partie du paysage ; Françoise équipe donc "son commerce" de la dernière nouveauté.

Savoir attirer et retenir la clientèle est aussi une des cordes à l’arc de la "patronne " ! La musique commence à entrer dans les murs, Françoise équipe le bar d’un phonographe. "C’était, me dit Jean-Claude, creusant au plus loin des souvenirs familiaux, un meuble aussi grand qu’un réfrigérateur, il renfermait dans sa partie inférieure une collection de disques, le mécanisme se remontait à la main".

L’installation posa cependant un réel problème dans lequel la technique n’avait aucune part de responsabilité. Informé de ce projet, la plus haute autorité paroissiale vint entreprendre François, le chef de famille, du danger que constituait, pour la jeunesse, un tel appareil capable de diffuser mélodies et paroles pas toujours très catholiques, du moins le disait-on. Impressionné par l’avertissement, notre forgeron se retrouvait pris entre le marteau de la morale et la robuste enclume conjugale ! "Pour se libérer du dilemme il a voulu, un instant, casser l’objet de la discorde, ajoute mon rapporteur". Mais, chacun connaît l’adage, "Ce que femme veut", à moins que ce ne soit, "La nuit portant conseil", la musique finit, là aussi, par adoucir les moeurs. Le "phono" échappa à ce qui aurait été la "casse du siècle" ! Mieux ! Bientôt un billard complétait l’équipement ludique du bistrot de Toulibil, permettant un peu plus encore l’enracinement et la fidélisation de la clientèle.

Ayant oeuvré pendant bien plus de cinquante années, Françoise céda la gestion de son café à sa fille Germaine en 1964.

En 1970, l’établissement changea de propriétaire et se transforma. Devenu "La Grange", la restauration, en particulier la crêperie, en fut un temps l’activité principale. Vers la fin des années quatre-vingt-dix il cessa toute activité.

Le second Bistrot.

A partir de 1925, il existait un autre bistrot à Toulibil, il occupait la maison voisine de la gare du tramway, du côté "ouest". Il était tenu par Marie-Yvonne Perrot, dont le mari, François Hall, fut employé jusqu’en 1932 à la société gérant le tramway.

On y trouvait aussi une épicerie et un dépôt de son. Cette denrée était prisée des agriculteurs pour alimenter le bétail. L’arrêt du tram, puis des cars, faisait qu’en semaine, une petite clientèle régulière fréquentait en même temps le bistrot.

Le dimanche voyait arriver d’autres clients : les hommes, revenant de la messe, s’arrêtaient à peu près à tous les bistrots. L’après-midi des jeunes en vélo, venant parfois d’assez loin, y faisaient aussi une halte pour se retrouver et discuter, des ouvriers agricoles y passaient parfois l’après-midi à jouer aux cartes.

Aux environs de 1939 le second café de Toulibil a cessé toute activité.

Mimi Simon, Ginette Raguénès, Marie-Ange Lannuzel et Jean-Claude Bleunven ont bien voulu confier leurs souvenirs. Ils ont été rapportés et mis en forme pour PHASE par, Marie-Louise et Henri Cloître, et Yvon Allain.